Atelier du 23 octobre 2018 « Progression »

PROGRESSION

A – Première étape -Inspirez-vous de cette image afin d’imaginer un récit : le lieu, la saison, l’ambiance, ce que vous voyez, ce que vous pouvez imaginer.

Contrainte : tout votre texte sera en noir et blanc. Aucune couleur.

Par Marie-Christine :

Au beau milieu de la place du Tertre, Kim hurlait comme c’est pas permis. Elle tétanisait tout le monde. Qu’était-il arrivé ? Un attentat ? Un accident ? Kim semblait terrifiée. Paniquée. Les passants s’interrogeaient. Apeurés. Tout à coup un rire fusa. Puis deux. Puis cent. Kim, elle, continuait à hurler . En fait, elle faisait face à un pigeon. Certes il n’avait qu’une patte Mais de là à être terrorisée, fallait pas exagérer. Et paniquer tout un quartier… En l’espace de quelques secondes elle s’était littéralement ridiculisée. Tandis qu’elle continuait à hurler les passants se remirent à marcher. Et la vie, du coup, reprit son cours…

Par Sylviane :

Elle est là, terrorisée, hurlant à nos oreilles . Cette femme, cheveux au vent, se cabre, ses mains se crispent. Nous pouvons presque voir les sueurs froides qui envagissent sa gorge. Nous nous interrogeons :

D’où vient-elle ?

Qui est elle ?

Plutôt élégante dans sa robe d’été à encolure ornée de dentelle, elle a surgi sur l’écran, bouche béante. La musique dramatise, accompagnant les cris de l’héroïne. Au bout de quelques instants d’angoisse pure, voici que soudain…

B – Seconde étape – vous découvrez le complément de cette image – Suite ou remodelage du récit A – Cette fois, plus de contrainte… si ce n’est de vous laisser aller à une écriture détaillée de la scène qui se précise .


Marie-Christine poursuit :

Kim habitait depuis peu dans le quartier. Elle s’était vite faite remarquer. Par ses hurlements. Quand son fils venait la chercher, pour faire les courses ou autre, tout le quartier en profitait. Il conduisait un side-car. Installée dans le bac, Kim hurlait. Dès qu’il démarrait. On comprenait que son fils l’enguirlandait. Mais rien n’y faisait. Kim passait sa vie à gueuler. Quand on sonnait chez elle, elle gueulait. Quand l’ascenseur s’élevait – ou descendait – elle gueulait. Elle vociférait. Pour un oui. Pour un non. Il n’y avait que la nuit où elle se calmait. Heureusement qu’on cauchemarde les yeux fermés… La vie de cette femme était-elle une vie ? Tout lui était insupportable. Insoutenable. Qui plus est, elle s’isolait. Evitait de vous rencontrer. Personne ne l’avait entendu parler. De cette femme (quelque peu névrosée) le quartier tout entier ne connaissait que sa voix de fada. Que sa voix de gaga.

Sylviane poursuit :

…Soudain, dans un bruit d’enfer, surgit un side-car conduit par le bandit des autoroutes nippones : Kumi. Casqué de noir, arc-bouté sur le volant, il rit, toutes dents dehors. Un rire dément, comme un rictus… Grisé de vitesse, le voici qui fonce droit devant, double tous les véhicules rencontrés, ignorant le danger. Ses mains gantées de cuir ressemblent à des tentacules puissantes.

La femme, toujours hurlant de terreur, est assise à ses côtés, tête en arrière, tétanisée.

Kumi, lui, semble le plus heureux des hommes : il vient de kidnapper la fille d’un très riche industriel de Tokyo. Elle est son butin mais il ne la regarde pas. Il sait qu’elle est riche et ça lui suffit. Son prénom ? Sans importance ; après, seulement après, lors de la négociation. Mais elle ne cesse de crier.
Kumi tourne enfin la tête vers elle ; trop voyante pour cette aventure, crinière rouge, robe rouge et ces hurlements de forcenée dans le side-car. De proie facile elle devient prise encombrante dans cette circulation.

Il redescend sur terre, son rire se ferme d’un coup. Derrière ses lunettes de soleil le regard tombe. Il sent faiblir ses cuisses, ses mollets. Il la regarde à nouveau et s’aperçoit qu’elle n’a aucune protection dans cette machine. Ni casque ni lunettes. Elle continue de s’accrocher désespérément au siège, animal pris au piège.
Kumi sait qu’il lui va falloir agir : pas question d’abîmer la marchandise. Et si elle allait lui faire une crise cardiaque, la petite ? Pas moyen alors de concrétiser ce qui s’annonçait comme l’affaire du siècle…

Kumi tremble dans son blouson de cuir. Il ralentit pour quitter l’autoroute et gare le side-car dès qu’il aperçoit un endroit discret. Là, d’un magistral uppercut il assomme la fille en rouge, se disant qu’il va ainsi pouvoir terminer son trajet en paix.

Le trajet va se terminer tout autrement.

Un tremblement de terre éventre la route, les arbres s’arrachent du sol, tout est englouti en quelques secondes. Un lourd silence s’installe.

Plus tard, lors des travaux de déblayage, le corps de Kumi sera retrouvé enlaçant étroitement celui de la fille cheveux rouges/robe rouge. Toutes dents dehors…

C – À partir du récit « B », imaginez maintenant un texte CONTRAIRE en tous points. Il faut cependant garder les éléments de l’image.

D – Acrostiche – avec les lettres suivantes :

A

C

R

O

S

T

I

C

H

E

Par Marie-Reine :

Attention, le virage est raide, très dangereux

C rier ne reussit pas a rendre heureux

R este, assise, hilare et bien concentrée

O ccupe ton esprit a le désorienter

S topper serait trop facile

T ourner est plus euphorisant

I nitier aux risques est très palpitant

C ache ton effroi si peu élégant

H orizon!!! approche toi, sommes tes enfants….

E t  poursuit le chemin jusqu’au bout du temps…..

Par Danièle :

Ah la cavalcade folle en side-car

C‘est la liqueur de la vie

Rouler sans en avoir marre

Onduler, cheveux au vent, selon ses envies,

Sensation d’extase et d’ivresse

Toujours plus vite, plus vite

Impalpable, envoûtante caresse

Cogne le cœur, c’est un nouveau rite

Hurler la liberté

Et avec fierté !

Par Marie-Christine :

Au volant d’un side-car,

Conduisant comme un dératé,

Roulant en klaxonnant

Ou bien en zigzaguant,

Sid allait gaiement au devant de la mort.

Tandis qu’il raccompagnait sa mère

Il avait décidé de mourir avec elle….

Chaque mètre les rapprochait à jamais.

Hystérique, toujours, ce fils avait été,

Et impuissante, sa mère resterait…

Par Monique :

Ah quel pied ,quel pied !

Cavalcade du vent dans mes cheveux de sang

Renaître sous l’orage, faisant fi de l’âge

Oublier ses douleurs, hurler de bonheur

Secouée, ballottée sur cet engin du diable

Tenir sans coup férir la barre du navire

Imiter le plaisir sous le fouet de l’ivresse

Croire au retour de l’été, au chaud de ses vingt ans

Héroïne du jour sur l’étalon puissant

Etre une autre, enfin, sans aucune faiblesse.

Par Ghislaine :

A quoi bon marcher en flanant dans un Tokyo pollué ?

C‘est être au moyen âge, ou à l’époque jurassique

Rien ne remplace la vitesse, rien ne grise autant

Oh, bien sur, la femme aussi

Surtout celle qui se cramponne à coté de moi

Toute rouge elle est, cheveux, robe et lèvres peintes

Il faut être fada pour partager cette aventure avec elle

Chi-Tan-Chu qu’elle se nomme et un petit pétard ne lui fait pas peur

Hé hé, j’accélère à fond, je suis spoutnik sur orbite

Et si le roi n’est pas mon cousin, mon royaume est le vent

 Par Camille :

Avec la poignée dans le coin

Contents de foncer sur l’autoroute

Rien ne les arrêtera

Oseront-ils longtemps braver les interdictions

Si seulement elle lui disait… oui !

Tout deviendrait alors plus facile

Il s’imagine déjà dans ses bras

C’est pourtant simple, puisqu’il l’aime comme un fou, la preuve

Heureusement qu’elle apprécie la vitesse

 Ensemble ce soir, ils iront dîner, et après… qui sait ? 

Atelier du 23 octobre 2018