L’ÉCRAN ET MOI
Il s’agit ici d’un écran de télévision.
Je lui ai montré mon corps,
mes petits manies,
mes ronflements,
mes abandons,
mes rires,
mon ennui…
A – Sous forme de lettre, adressez-vous à VOTRE écran de télévision. En cours d’écriture, inclure le 3 lignes d’un petit poème tiré au hasard. (en gras)
Chère téloche !
Je vous écris pour vous dire que je vous quitte. Je suis, maintenant, poète à plein temps. Et n’ai plus envie de me planter, devant vous, comme avant. Même si je vous ai supportée durant 50 ans. Et si vous m’avez parfois évité de déprimer, je le reconnais. Vous pouvez continuer à vous transformer en ce que vous voulez, je ne changerai pas d’idée. Désormais je mange en vers. Je dors en vers. Je me lave en vers. Je sais que je vais vous manquer. Aussi, pour me faire un minimum pardonner je vous ai, un poème, concocté. Je l’ai pondu ce matin en vous passant le plumeau sur le dos. Je vous le livre tel quel. « Fleurs mauves de l’automne, portez-vous le deuil des derniers beaux jours ? ». Si ces mots vous laissent de glace ou si vous n’y comprenez rien , c’est pas grave. La poésie c’est ça aussi. Sur ce, chère téloche, je vous laisse. J’ai pensé un instant vous remiser au grenier. Mais de vous, j’ai eu pitié. Je vais juste vous débrancher. Vous serez à mes côtés. Mais de côté. Ecran noir je ne vous dis donc pas à ce soir. Je m’en vais de ce pas écrire un poème sur quelque chose que j’aime. J’hésite entre un haïku ou un sonnet. Je ne sais vraiment pas où la poésie va me mener.
Marie-Christine
Mon ami,
Toi, mon ami, qui me tiens compagnie les nombreuses nuits d’insomnie, que puis-je te donner en échange ? Nous n’avons pas les même objectifs !… Je crois, d’ailleurs, que peu t’importe ma présence ! Moi ou quelqu’un plus, quelle différence pour toi ! A l’inverse, pour moi, tu comptes énormément pour combler mes moments d’angoisses nocturnes…
Lovée dans mon canapé, je me laisse bercer par tes susurrements qui glissent au creux de mon oreille… Il m’arrive de m’alanguir au rythme des sons que tu égrènes… Les yeux mi-clos je vogue entre rêve et réalité… Tu m’éclaires d’une douce lumière qui vacille entre pénombre et clarté… Mon corps a quelques soubresauts quand je commence à me laisser sombrer. Mais aussitôt un réflexe incontrolable me fait réagir en rouvrant les paupières…
Dans un état de semi-conscience je t’entends me psalmodier :
» Passiflores ou roses,
Etes vous vraiment
Les fleurs de l’amour ?”
Dans mon cerveau somnolant, ces quelques vers tournent en ritournelle… Désolée pour toi ! Je dois immédiatement réagir ! Pour cela, qu’une chose à faire : me lever et me concocter une tisane à la passiflore ! Je ne sais si elle m’apportera l’amour, mais c’est certain elle va me jeter dans les bras de Morphée !
Silence maintenant ! Je t’ai déconnecté !…
Claire
B – Toujours sous forme de lettre, que pourrait bien répondre le même écran ?
Incorporer au texte le second petit poème en votre possession.
Bien à toi,
Après lecture de ton message, je m’insurge contre toi ! Ta présence m’est indispensable ! Certes, nous ne conversons pas mais reconnais que ma présence a tout de même du bon…
Nous sommes en quelque sorte intimement liés. Pour ma part, sans toi, je ne pourrais pas fonctionner ! J’ai un besoin vital que tu m’allumes pour que mes connexions ne s’empoussièrent pas !
Et trôner sur mon meuble comme une potiche ne nous apporterait rien ! Ne crois-tu pas ?
“Parfois,
Le printemps venu,
Frileux nous aimons
Rêver encore au coin du feu”
où il m’arrive de te bercer par une mélodie, un film ou quelque émission qui, faute d’être très suivis, font un fond sonore qui répond et complète le crépitement du bois incandescent !
Ne sois donc pas bégueule et reconnais que notre relation suivie parcimonieusement ne peut que nous satisfaire.
De toute manière, c’est toi qui en choisis le rythme, la fréquence.
De mon côté, je ne peux pas être plus souple puisque je me plie sans conteste à tes envies, à tes moindres désirs… Alors que voudrais-tu de plus ? Qu’attends-tu davantage de moi qui ne peux être plus servile ?…
Restons donc en bons termes et notre cohabitation ne pourra nullement en souffrir. Tu verras, tout ira bien…
Je te resterai fidèle autant que tu en sentiras le besoin…
Claire
Chère ingrate.
Je ne peux ne pas te faire part ce que je pense de toi. De plus, je sais plein de choses (sur toi). J’ai noté tout ce que tu as fait devant moi. Notamment ce que tu as pu faire d’olé-olé sur ton canapé. Des fois je t’aurais giflée. Tellement tu exagérais. Comme tu m’as mis au chômage eh bien je vais te faire concurrence. J’ai la colère rance… Je me suis mis, moi aussi, à faire des vers. Et je n’ai pas hésité. Pendant que tu te tâtes (entre haïku et sonnet) moi je fais dans le court. Et l’animalier. Je te dis ceci. : « Sur trois notes, la hulotte pleure son clair de lune ». Et vlan ! .. Prends-toi ça dans les dents…Chère ingrate, mes vers valent autant que les tiens. Sache que je harcèlerai de rimes jusqu’à a Saint Glinglin… Ce que tu as fait à ta fidèle téloche, vraiment c’est très moche !
Marie-Christine
C – À partir des 2 poèmes courts, imaginer une suite poétique dont le titre sera :
DERRIÈRE L’ ÉCRAN.
Derrière l’écran
Couleurs de l’été
Diffuse la télé.
Images de beauté.
Enfin renouveau
Vers des jours très beaux
Comme vrai cadeau.
« Le printemps venu
Frileux nous aimons
Rêver encore au coin du feu »
Plus pour très longtemps
Car viendra le temps
Pour les sentiments.
« Passiflores ou roses
Etes-vous vraiment
Les fleurs de l’amour ? »
Dans l’instant présent
Vous faites des champs
Un tableau charmant.
En moi naît le rêve
Par douce trêve
De liaison brève.
Avec les beaux jours
Me jouera le tour
De l’amour toujours !
Ne pas se bercer
Par les jolies fées
Que tu fais passer !
Télé allumée
Ne doit pas voiler
La réalité !
Claire
Derrière l’écran
Surgit le marchand d’habits
dans l’aube azurée de juin.
Paraît derrière l’écran
Paraît derrière l’écran
le marchand d’habits chiffons.
Il a dans ses mains ouvertes
Il a dans ses mains ouvertes
une ombrée de regrets, rousse
comme un départ nostalgique.
Soudain monte à l’horizon
nostalgique mélopée
des effacements de nuits
lorsque le marchand d’habits
paraît derrière l’écran.
Sylviane
Derrière l’écran
Derrière l’écran il y a le monde plein de bruit et de fureur
orageux et tapageur
qui effraie les voyageurs
Derrière l’écran il y a des trains
qui s’élancent dans le heurt des aiguillages
La locomotive « Pacific 233 » majestueuse
souffle son haleine de forge
dans des gerbes d’étincelles
qui volent vers le soleil.
Derrière l’écran il y a le chemin des écoliers
et pour rentrer chez moi
j’aime ce détour
coin de nature épargnée
par l’enfance retrouvée.
Rose
LA VIEILLE HORLOGE
S’EST ARRETÉE
DEPUIS LE TEMPS S’ÉTIRE
Sur son fauteuil usé
Sur son fauteuil usé
S’est lovée la femme
Les yeux rivés sur la télé
la vieille horloge
A suspendu le temps
Personne ne sait
L’heure qu’il est
C’est une nuit étoilée
Un de ces soirs
Qui fait rêver
Un feu de camp est allumé
Et la guitare s’est emballée
AU COU DE LA TZIGANE
LAPIS-LAZULI
PIERRE DE LUNE ET JADE
Dans sa roulotte
Tout à côté
la femme s’est éveillée
DERRIERE L’ECRAN
Elle s’est glissée
Dans ses yeux noirs
Des larmes pour seul reflet
Son homme la tzigane a volé
Elle danse, fière de son collier
Présent de l’être aimé.
Monique
atelier du 10 avril 2018 Sylviane Blineau