D'UNE CHAMBRE À L'AUTRE
De chambre en chambre
C’était en haut de l’au-delà
Tout en haut, avec les invisibles.
Le néant jouait dans le vent,
Semait ses riens, alimentait mes doutes.
Lorsque des nuages émergeaient de l’aube
Deux par deux, cahin caha
Etirés dans le bleu du bleu,
Je faisais mes premiers pas.
Nous allons tous là, je le sais.
Comme si jamais n’avait jamais existé.
C’était notre poème muet.
En haut, tout en haut de l’au-delà.
D’enfant, d’ami, de bonne ; mansardée ou mortuaire.
Une chambre.
Marie-Christine
Nuit
C’était en haut de la grande ville
Tout en haut avec la maison sur la colline surmontée d’une girouette
Qui jouait dans le vent, et
Semait ses notes musicales dans l’obscurité
Lorsque celle ci s’efface pour annoncer les prémices de l’aube
La lumière d’un coup rougeoit de plaisir
Etirée dans le bleu du bleu
Pour former d’immenses étendues violettes
Nous nous rapprochons les uns des autres
Comme si l’approche du jour laissait place à l’imagination
C’était notre poème muet
En haut tout en haut
La maison ouvre ses persiennes, que dissimulent
Une chambre
Nadine
Ma chambre secrète
C’était en haut de ma tour d’ivoire
Tout en haut, avec mon oiseau bleu
Je chantais et il jouait dans le vent
Semait ses plumes couleurs arc-en-ciel
Lorsque la Vénus de l’aube
Nous quêtait, et les noir-gris
Etirés dans le bleu du bleu
De mon oiseau qui me donnait ses ailes
Nous, lui et moi,
Comme si nous n’étions plus jamais séparables
C’était notre poème muet
En haut tout en haut de ma tour d’ivoire
Mon oiseau et moi, un secret enfermé sous clé dans
Une chambre
Iris jiang
Dans l’amandier
C’était en haut de l’amandier bruissant et rose,
Tout en haut, avec mars frileux.
Mon poème jouait dans le vent,
Semait ses mots, ses libertés
Lorsque les joutes de l’aube
S’emperlaient en oublis de rêves.
Etirés dans le bleu du bleu,
Quittant nos robes de nuit,
Nous inventions des horizons,
Comme si nos écrits falsifiaient le monde.
C’était notre poème muet
En haut, tout en haut de l’amandier bruissant et rose,
Chuchoté pour le soleil levant, comme le chaud
d’une chambre.
Sylviane
Une cascade d’or
C’était en haut d’une cascade d’or,
Tout en haut, avec ses bras de sable,
Le soleil essoufflé jouait dans le vent,
Semait ses murailles de perle et enflammait le temps.
Lorsque les hirondelles à la bouche de l’aube
Traversaient la lumière, des perles de vitrail fondaient sur nos regards.
Étirés dans le bleu du bleu,
Nos rêves se mêlaient aux lèvres de nos yeux.
Nous écrivions nos vies sur l’émail du silence.
C’était notre poème muet
En haut, tout en haut d’une cascade d’or
D’où coulait notre amour, nous effacions les murs, les fenêtres et les toits, et plus tard
Une chambre.
Monique
Grenadine de mots
C’était en haut de mon imaginaire
Tout en haut, avec des voiles vaporeux
D’où émergeait mon corps qui jouait dans le vent
Semait ses désirs, ses pulsations, ses soupirs.
Lorsque le feu me harponnait dans la fraîcheur des draps, De l’aube
Au matin abouti, je les voulais encore les yeux larmoyants
Etirés dans le bleu du bleu
Parfois je n’étais pas seule, ses courbes blotties contre ma nudité
Nous étions dans le silence, peau contre peau immobile chaleur
Comme si nous ne faisions qu’un, caressés de lumière
C’était notre poème muet.
En haut, tout en haut l’imaginaire se délitait peu à peu
J’atterrissais doucement sur le vide de la nuit.
Une chambre.
Et si c’était
Vrai
Francis
Sylviane Blineau janvier 2017